Aristides HONYIGLO

Les chargeurs de portables, leurs contrefaçons et nous

C’est une évidence qu’une fois les téléphones portables déchargés, il faut bien les recharger. Avec quoi ? Un chargeur bien sûr, (se) susurre-t-on intérieurement (excusez le double pléonasme, c’est plus un signe de confusion qu’autre chose). Mais, comment fait-on lorsqu’on ne dispose plus d’un chargeur ? Alors qu’il y a quelques instants, l’on possédait encore la contrefaçon du dudit chargeur, on est en droit de se faire du souci. Et surtout quand on ne sait pas où trouver la contrefaçon du contrefait, alors là on est mal barré !

Le carrefour Dékon à Lomé (Crédit : lomeplastic.mondoblog.org)
Le carrefour Dékon à Lomé (Crédit : lomeplastic.mondoblog.org)

Dans ce cas, il ne reste qu’une piste : Dékon. Le célèbre quartier de Lomé dont nous parlerons une autre fois. Le marché de toutes les contrefaçons (ou kpayo¹ ) le jour, coin « chaud » pour péripatéticiennes et compagnie la nuit. Arrivé sur place, c’est une jolie équipe de marchands contrefacteurs et donc de matériels contrefaits, constitués en comité d’accueil qui vous souhaite la bienvenue. Mais ne soyez pas trop enthousiasmé par cet accueil à la togolaise ² au point de vous oubliez. Prenez surtout garde à votre propre matériel numérique que vous trimbalez (téléphone portable, tablette, ordinateur etc.). Il pourrait se trouver sur place, des clones en grand modèle de petits voleurs à la tire dont le politique français, François Bayrou aime bien «caresser» les joues. Les gars à cet endroit sont tellement friands du matériel électronique, qu’ils peuvent vous «emprunter» le vôtre pour toujours !
Le temps de vérifier le lieu de fabrication des appareils et l’on se rend compte aisément que tout est « Made in China.» La Chine, la plus vaste usine du monde du contrefait à ciel ouvert.

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Chargeurs de portable à LED : danger de court-circuit et d’incendie
À Dékon, les chargeurs de téléphones portables sont en grande majorité des contrefaçons, avec des luminescences (LED) fluorescentes rouges ou bleues… À l’intérieur du chargeur, le LED est disposé sur le circuit électrique de façon à être très voyant à l’extérieur du boitier, grâce à une partie transparente. Plus grave, le danger à la longue ou même dès la première utilisation, c’est que le LED chauffe et peut faire fondre le boitier du chargeur. Il faut alors avoir de la chance ou du flair pour observer ce dysfonctionnement.
Après avoir branché le chargeur du portable sur le secteur électrique, une odeur de brûlé, couplée à un léger bruit continu, se fait sentir. Pour un « spécialiste » du plastique, cela fait tilt ! Je reconnus sans difficulté l’odeur du polypropylène qui brûle. Je m’approche de la source de l’odeur et du bruit sourd qui se révèle être le chargeur de portable. Ce dernier est vite débranché. Ouf, hors de danger !
Avec un tournevis, je démonte le boitier et constate à l’intérieur les dégâts. Le LED est complètement fondu. Cela aurait pu faire fondre le boitier qui à son tour aurait consumé le cordon, puis la prise électrique… Et Dieu seul sait si un court-circuit n’aurait pas entraîné un début d’incendie. Bien sûr, il y a les fusibles du bloc-ménager, de la prise électrique ou de l’armoire électrique ; mais imaginez que ce fut la nuit.
Le hic dans cette histoire, c’est que le lendemain,( je) l’on reparte encore à Dékon racheter un autre chargeur de même type, contrefait ! Que faire d’autre ? Entre un chargeur d’origine coûtant à partir de 10 000 francs CFA et sa contrefaçon vendue vingt fois moins, le choix est imprudent, mais rapide et clair. Faute de moyen, on se rue sur du matériel contrefait, qui dépanne c’est vrai, mais expose aussi à d’inimaginables dangers domestiques. Alors prudence tout de même ! La sécurité voudrait qu’on utilise toujours (dans la mesure du possible) des matériels électriques d’origine ou de bonne qualité.

A.H

¹ kpayo : terme désignant les contrefaçons.
² accueil à la togolaise : réputé être très chaleureux avec son immanquable «bonne arrivée.»

 


Une larme pour mes chers arbres

Depuis 1977, chaque 1er juin au Togo est l’occasion de la célébration de la Journée nationale de l’Arbre. « Arbres, forêts et climat » était le thème choisi pour cette année.

Au Togo, la Journée nationale de l’Arbre est devenue une institution, un événement durant lequel, officiels, ministres, administratifs, et même officiers de l’armée plantent des arbres de différentes espèces, comme le Khaya senegalensis1. Des milliers d’arbres ont ainsi trouvé une place en terre cette journée. Merci. Et pourtant, j’ai un pincement au cœur, la larme à l’œil.

1er juin 2015, des officiels mettent des plants en terre dans la banlieue de Lomé (Crédit photo :
1er juin 2015, le ministre de l’environnement met un plant en terre dans la banlieue de Lomé (Crédit photo : fullnews.com)

Ce qui me chagrine, ce n’est pas le petit pourcentage du couvert végétal (7 % de la superficie du Togo). Ce n’est pas non plus l’état dans lequel ces jeunes plants végèteront avant de croître. Car après les solennités, il faut que ces pousses « luttent » pour survivre. Parfois, ils ont la chance d’être plantés au bord de beaux boulevards ou de belles avenues. Presque quotidiennement, ils sont arrosés par les agents de la Commune ou de la Direction de la protection des végétaux. Généralement, un treillage en bois ou en fer les soustrait d’éventuels bêtes errants. Sinon, devant la devanture d’une maison de banlieue, pour passer le 1er juin prochain, il faut avoir la baraka quand on est un arbuste pour résister au manque de soin, d’entretien, à l’insolation et aux assauts quasi quotidiens des ruminants.

Une « montagne de bois de chauffe » à Lomé (Photo : Lomeplastic)
Une « montagne de bois » de chauffe à Lomé (Photo : Lomeplastic)

Non, rien de tous ces faits ne m’émeut pas. Ce qui me trouble au point de laisser couler une larme pour mes chers arbres, c’est cette « montagne de bois » de chauffe que j’ai vue ce weekend. Alors que l’Arbre est célébrée cette semaine (jusqu’à la fin juillet), la vue de ce tableau m’a coupé le souffle. Il y a quelques années, adolescent, nous nous moquions de l’écologiste suisse Franz Weber qui venait pleurer à la télévision togolaise pour quelques singes abattus par les braconniers dans la réserve de faune de Fazao (300 kilomètres au nord de Lomé). Entre-temps, devenu militant écologiste, je comprends qu’on puisse pleurer pour des arbres et encore plus, pour des animaux.

Je ne nommerai pas le nom de la rue, ni n’indiquerai l’adresse de ce malheureux spectacle. Je n’ai aucun grief à l’encontre du propriétaire de cette « montagne de carbone » qu’il a bien fallu des années pour constituer. Peut-être que ces bois ont été acquis légalement à l’ODEF2, peut-être aussi qu’ils proviennent d’un terrain appartenant à leur propriétaire ou bien de l’abattage des arbres (que les entreprises BTP ont promis de replanter) sur les chantiers des routes en construction… Je n’ai pas voulu en savoir davantage. Tout ce que je sais, c’est que j’ai eu mal. Ce tableau de tas de fagots, de sacs de charbon de bois alignés, se voit plutôt le long des routes nationales. Maintenant, plus besoin de voyager à l’intérieur du pays. C’est en pleine ville qu’on le rencontre.

La facilité avec laquelle, on peut à l’aide d’une simple machette ou avec la terrible tronçonneuse, couper, découper, abattre des arbres décennaux voire séculaires. En même temps qu’on plante peu, on coupe plus. Dommage ! Pour faire de la cuisine qu’est-ce qui nous reste si la bouteille de gaz butane (12,5 litres) se raréfie, n’est plus subventionnée, et au prix de 6.500 francs CFA voire 7.500 francs CFA dans les circuits parallèles. Le bois de chauffe ? Quid des foyers améliorés3, de la production domestique du biogaz ? Quid aussi du reboisement ou du changement climatique ?

Selon le ministre de l’environnement et des ressources forestières, annuellement nous plantons 3.000 hectares d’arbres quand on en déboise 15.000 ! Et nous voulons atteindre 20 % en couvert végétal à l’horizon 2035. La tâche sera difficile à supporter, comme l’émotion qu’a suscitée la destruction récemment de la forêt classée de Bayomé (40 kilomètres au nord-ouest de Lomé) dans l’indifférence totale. Ni ministre, ni écologiste, ni activiste, personne n’avons eu mot à dire, n’avons pu empêcher ce crime contre la biodiversité. Car il n’y a pas d’autre mot pour qualifier ce suicide collectif. Je verse une larme pour mes chers arbres.

A.H

1 Khaya senegalensis : appelé Mahogen en éwé, arbre dont l’écorce est très utilisé dans la pharmacopée locale.

2 ODEF : Office de Développement des Forêts.

3 foyers améliorés : fourneaux écologiques, économiques en charbon de bois.

 


Le «masochisme» des électeurs jusque dans les urnes : le cas togolais

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Voilà pourquoi depuis fin avril 2015, subitement, je suis devenu aboulique, démocrate et «tétraplégique.» Je suis dans ma période post-traumatique. Mon ultime espoir reste l’AIPA,** pour que je recommence à blogger !

 

* tchakatou : sortilège vodou

** AIPA : Association internationale pour la psychologie analytique

A.H.


Afrique immigrée

Cent immigrés sans-papier et sans patrie.

Cent africains vont aux Canaries.

Sans souci d’un cachet, d’un visa,

Ils voguent et vont vers Lampedusa.

 

Sans abri, sans logis, sans un toit,

Suer sang et eau dans le froid.

Se dépensant en nageant pour Melilla

La mellifère où parler catalan à Ceuta.

 

Aristides K. Honyiglo,

©Les Ailes de nos rêves, Les Messagers de l’espoir, Poèmes, Lomé, 2011.


« Mon coup de cœur pour la musique» du Sénégal (2/3)

Ma rencontre avec la musique du Sénégal se poursuit, cette fois avec les artistes femmes. Il y en a des centaines, célèbres, mais c’est un choix véritablement très difficile que de choisir seulement trois. J’aurai bien voulu les citer toutes, des « gawlo » ou griottes Yandé Codu Sène, Athia Wellé… avec leurs kora, ndere et autres xalam aux modernes, mais tout un blog n’y suffirait pas. Je ne nomme ici que trois représentantes de la musique sénégalaise.

D’abord Viviane Chidid, (ex-Viviane N’Dour) qui peut-être considérée comme le « consensus » entre le traditionnel et le moderne, voire l’ultramoderne avec «Reetan»

 

Ensuite Paulette Diémé qui représente l’autre courant de la musique sénégalaise, c’est-à-dire sa créolité, avec l’influence de la musique lusophone apportée surtout par la communauté capverdienne. Cette fusion donne des mélopées assez particulières avec des rythmiques zoukantes à la morna ou carrément avec des textes en portugais que j’aime beaucoup. Paulette ici sur Loméplastic, avec «Nha confianca » tiré de son tout récent album Nha Luz (2015).

 

Enfin, la « nouvelle vague » des artistes musiciennes sénégalaises que j’ai découverte récemment. En attendant la suite de  « Mon coup de cœur pour la musique » sénégalaise, je vous laisse avec l’une des « meneuses » de ce courant, en la personne de Marema avec l’un de ses titres plutôt futuriste « Femme d’affaire » :

(A suivre)

A.H


Présidentielle togolaise : Faure Gnassinbgé se retire de la course

La rumeur a circulé toute la soirée de mardi dans les milieux diplomatiques et dans les QG des partis politiques mais personne n’en revenait. Sûrement que les nouvelles en provenance du Nigeria [l’annonce de la victoire du candidat de l’opposition Muhammadu Buhari] ont joué dans la prise de cette décision et par ailleurs noyé l’information. Contactés, certains responsables politiques ont jugé bon d’attendre les éditions des journaux de la nuit de la télévision publique (TVT) pour confirmer ou infirmer cette annonce. Mais aucune nouvelle n’a été diffusée à ce propos. Au contraire, ce sont les images des audiences du président de la République qui ont été abondamment servies aux téléspectateurs.

Ce n’est que tard dans la nuit que la nouvelle a été confirmée par un communiqué laconique de la présidence togolaise, relayée par son site gouvernemental officiel « republiqueoftogo.com » Selon ce communiqué, « le chef de l’Etat togolais, vu la situation préoccupante du pays, vu les cristallisations qui se font autour de sa personne et de son bilan qui ne satisfait pas une partie de la population; a décidé dans un sursaut patriotique de se retirer de l’élection présidentielle prévue pour le 25 mars 2015 » « afin de préserver la paix et l’unité du pays. » La nouvelle été accueillie par une clameur en sourdine par le peu de citoyens qui ont eu l’information en pleine nuit. Les appels téléphoniques des togolais du pays vers et entre ceux de la diaspora togolaise ont fusé de partout. Un chassé-croisé a alors suivi cette annonce dans les milieux des journalistes. Beaucoup d’entre eux qui disposaient de moyens de communications se sont rués sur leurs terminaux numériques dotés de connexion à Internet. On a même signalé dans le quartier Kégué (banlieue nord-est de Lomé) le cas d’un journaliste qui est allé réveiller le propriétaire d’un cybercafé au beau milieu de la nuit, pour acheter seulement 3 minutes de connexion internet afin de vérifier l’information ! Manque de veine, l’électricité a été coupée à cet instant précis et crucial ! La bande passante a ainsi été si sollicitée qu’elle s’est saturée dans un premier temps. Beaucoup ont alors craint de connaître les situations récentes de Kinshasa ou celles de 2005 au Togo [quand les communications téléphoniques et Internet ont été coupées au lendemain du scrutin présidentiel]. Un porte-parole du ministère des Télécommunications et de l’économie numérique a démenti cette information, expliquant que la saturation de la bande passante était dû au nombre exceptionnel d’utilisateurs qui se sont connectés simultanément. La connexion internet s’est rétablie peu après, avant de se normaliser  vers 2 heures du matin ce mercredi.

Selon des indiscrétions, une ambiance de fin de règne a plané sur le palais présidentiel où le président sortant est venu précipitamment dans la grande nuit pour faire sa déclaration de « retrait de la course de la présidentielle de 2015. » Son service de communication a été débordé par les sollicitations des appels de l’étranger, et qui voulaient s’assurer de la véracité de l’information. Plusieurs collaborateurs du chef de l’Etat étaient au bord de l’émotion. Certains auraient même versé des larmes, sans doute craignant pour leur avenir aux lendemains incertains. « Je me demande, si l’on a travaillé de façon honnête et loyale pour son pays au sein d’un cabinet, pourquoi doit-on craindre pour son avenir au remplacement de ce cabinet ? » s’est alors demandé un journaliste des médias officiels réquisitionnés pour immortaliser l’événement. A ce sujet, le président sortant Faure Gnassinbgé a eu un dernier aparté avec l’ensemble du personnel de la présidence qu’il a rassuré sur son avenir. Des informations ont alors fuité sur les réseaux sociaux notamment Facebook et Twitter utilisés majoritairement par les internautes togolais. Selon ces indiscrétions, Faure Gnassinbgé aurait conclu un accord secret avec les autres candidats de l’opposition afin qu’en cas d’accession d’un des leurs à la présidence, ce dernier veille à conserver ses anciens collaborateurs de la présidence avec « tous les avantages de logement VIP et de transport en l’occurrence, une Mercedes Maybach attribuée à chacun.» Cela rassurera certains courtisans du président qui légitimement auraient craint de faire les frais d’affectations punitives, comme il est courant dans les administrations publiques africaines. Ecartée donc la peur de se retrouver à Mandouri, à 700 kilomètres à l’extrême bout du pays pour le seul fait d’avoir travaillé avec le président sortant.

Selon le magazine en ligne skateafrik.com le président sortant aurait confié un jour à l’un de ses proches qu’ «il était fatigué du pouvoir, et d’entendre dans ses oreilles à longueur de journées les contestations des opposants,»  « le fauteuil présidentiel est-il la seule finalité quand on s’engage en politique ? Les cimetières sont remplis de chefs d’Etats qui se croyaient indispensables à leur pays. Je voudrais me conformer à la volonté des togolais qui souhaitent à 85% la limitation du mandat présidentiel à dix ans. Je préfère terminer ma carrière dans l’action humanitaire internationale.  » aurait-il ajouté. Belle reconversion, observera-t-on. Voilà qui confirme qu’il y a une vie après la présidence ! Rappelons aussi que Faure Gnassinbgé 49 ans, est arrivé à la tête du Togo en 2005 dans la contestation. C’est après le décès de son père, l’ex-président togolais Eyadèma Gnassinbgé. Réélu en 2010, il a continué à faire l’objet de contestation dans le pays, notamment de l’opposition qui lui a prêté, jusqu’ à hier soir, l’intention de « vouloir mourir au pouvoir comme son défunt père.» Notons que c’est la première fois en Afrique qu’un président en exercice et en course pour sa propre succession, retire sa candidature de la présidentielle. Il le fait alors que la Constitution togolaise du 14 octobre 1992 (amendée en 2002 par l’Assemblée nationale acquise à l’ex-président Eyadéma) lui permet de se représenter indéfiniment. Il continuera néanmoins, d’assumer les charges de président de la République jusqu’à l’entrée en fonction de son successeur. Les partenaires du Togo devront prendre en compte cette nouvelle donne, pour ne plus reclasser ce pays ouest-africain dans la catégorie de ceux ne respectant pas les normes standards démocratiques.

A.H


« Présirendum¹ » pour réformes impossibles au Togo

En cette semaine de célébration de la Francophonie, je voudrais m’épancher un tantinet sur la politique dans notre pays : le Togo. D’aucuns se demanderaient qu’est-ce qu’ont en commun Francophonie, politique et un pays. Quand politique et linguistique se frottent, qu’est-ce qui en naît ? Un néologisme sans doute. Le texte est aisément compréhensible pour tout observateur de la politique togolaise, mais paraît sibyllin aux personnes étrangères à l’actualité de ce pays. A ces dernières, les longues « notes de bas de page, » sont là pour la compréhension. Mais le plus important, c’est le néologisme qui en résulte et que j’offre à la postérité, au monde francophone : le « présirendum. » Fera-t-il un jour, l’objet d’une entrée dans les dictionnaires ? Qui vivra verra…

Sur la situation politique du Togo

« Article 4 – La souveraineté appartient au peuple, il l’exerce par ses représentants et par voie de référendum. Aucune section du peuple, aucun corps de l’Etat ni aucun individu ne peut s’en attribuer l’exercice.

L’initiative de référendum appartient, concurremment, au peuple et au président de la République.

Un référendum d’initiative populaire peut être organisé sur la demande d’au moins 500 000 électeurs représentant plus de la moitié des préfectures. Plus de 50 000 d’entre eux ne doivent pas être inscrits sur les listes électorales d’une même préfecture. La demande devra porter sur un même texte. Sa régularité sera appréciée par la Cour constitutionnelle. » (Constitution togolaise du 14 octobre 1992, patouillée, tripatouillée et violée à la Saint-Sylvestre du 31 décembre 2002 par le groupe-choc RPT2 du célèbre « juriste à la barbiche3.»)

La proposition…

« Puisque les « fameuses réformes » sont un poids de plomb au cou, pourquoi Votre Majesté ne les couple-t-il pas avec la « présidentielle » d’avril (?) 2015 ? Question : « Voulez-vous que votre patelin établisse le nouveau record Guinness Book du plus long règne d’un monarque ? OUI / NON. » Cette question référendaire sera le sixième « candidat » aux côtés des « pions » qui vous accompagneront sur « l’autoroute à six-voies pour vous légitimer4

Le vote-ci n’étant pas censitaire, peut-être m’y rendrai-je. D’autant qu’ici les élections, à part avril 1958, ne servent pas et l’on n’aura guère l’impression d’être en dehors d’un royaume du Togo, Sire !

Votre très humble et obéissant serviteur.»

Lomé, le 25 mars 2015, royaume du Togo

 

Couronne royale (Crédit photo : canstockphoto.fr)
Couronne royale (Crédit photo : canstockphoto.fr)

 

¹ Présirendum© : néologisme pour une élection présidentielle couplée avec un référendum.

² Le Togo : 56 600 km2, Afrique de l’Ouest. 27 avril 1958, élections législatives et victoire des nationalistes en route pour « l’indépendance.» Le 27 avril 1960, proclamation officielle de l’« indépendance » de ce petit pays, avec comme premier président de la République l’intrépide nationaliste Sylvanus Olympio (1902-1963). 13 janvier 1963 : « coup d’Etat militaire » et assassinat d’Olympio par le sergent Etienne Eyadéma (1936-2005) et une horde de demi-soldes de l’armée coloniale revenus d’Indochine et d’Algérie. Le général de Gaulle lui dira des années plus tard : « Vous avez zigouillé Olympio, vous avez eu tort ! » comme si lui, le longiligne général n’en était pas au courant. Nicolas Grunitzky (1913-1969) beau-frère d’Olympio, prend la tête de l’Etat togolais. 13 janvier 1967, nouveau coup de force du même groupe de militaires, en manque de sensation sûrement. Le commandant Kléber Dadjo prend le pouvoir. 14 avril 1967, le lieutenant-colonel Eyadéma destitue Dadjo et devient chef du pays. 30 novembre 1969, création du RPT parti unique. 23 septembre 1986, un commando d’opposants dits « terroristes » (déjà ! Les Américains n’ont rien inventé le 11 septembre 2001) venu du Ghana, essaie de faire secouer Eyadema et son régime dur. 20 juin 1990 Conférence de La Baule (France), Mitterrand le président demande, somme presque les (principaux dictateurs)Africains d’instaurer (enfin) le multipartisme. Il sera bien écouté par les Togolais. 5 octobre 1990, après 23 ans de règne sans contestation, premières manifestations populaires pour rappeler à Eyadema et son pouvoir qu’ « un peuple amorphe, n’est pas toujours un peuple qui dort. » 10 avril 1991, instauration du multipartisme avec poursuite de la contestation populaire. 8 juillet 1991, début d’assises nationales dites « Conférence nationale souveraine. » 27 septembre 1992, référendum et adoption à la soviétique 98,11 % d’une Constitution prévoyant entre autres de limiter la mandature présidentielle à deux mandats de cinq ans chacun. 14 octobre 1992, promulgation de la Constitution adoptée… 25 août 1993, « réélection » d’Eyadéma. 4 janvier 1994, nouvelle attaque d’opposants « terroristes » contre le même régime presque trentenaire. 21 juin 1998, Re-«réélection» d’Eyadéma Gnassingbé, cette fois-ci, c’en est trop pour ses opposants. 9 juin 1999 Accord de Lomé sous l’égide de Chirac, oui Jacques devenu depuis l’anosognosique, entre les opposants togolais et général Eyadéma qui donne « sa parole d’ex-sergent de la Colo » de ne plus jamais, alors-là au grand jamais, se présenter de son vivant à une présidentielle sur la « Terre de nos Aïeux » dit Togo. Et pourtant, et pourtant le… 31 décembre 2002 l’assemblée uni-monocolore du RPT sous l’intelligence du célèbre avocat à la barbiche (qui ratera plus tard le coach le 5 février 2005 !) et ses camarades, fait voler en éclats le verrou constitutionnel en l’article 59 limitant le mandat présidentiel. A titre de comparaison, voici le texte des articles 59, originel de 1992 : « Le Président de la République est élu au suffrage universel direct pour un mandat de cinq ans renouvelable une seule fois. En aucun cas, nul ne peut exercer plus de deux mandats.»; et celui tripatouillé dix ans après, le 31 décembre 2002 : « (alinéa 1)Le Président de la République est élu au suffrage universel direct et secret pour un mandat de cinq (5) ans.(alinéa 2) Il est rééligible (alinéa3). Le président de la République reste en fonction jusqu’à la prise de fonction effective de son successeur élu. » Du beau travail donc! Ils ouvrent ainsi le boulevard à tout président de la République togolaise de rester au pouvoir ad vitam aeternam ou d’y mourir s’il le souhaite. Avec en bonus, sa succession par un de ses fils, si ce dernier le conçoit. Ainsi resurgit jusqu’à ce jour, ce qu’il convient d’appeler le « drame togolais. » Nota Bene : pour la suite de la chronologie, veuillez saisir « Crise politique togolaise » sur un moteur de recherche, si vous avez la connexion Internet…

3 Fambaré O. Natchaba, ex-président de l’Assemblée nationale.

4 D’après Abass Kaboua, président du parti Mouvement des républicains centristes (M.R.C.) sur Radio Kanal FM Lomé, 27 février 2015.

Aristides Honyiglo


Journée internationale des femmes, à toutes…

L’initiative est personnelle mais indispensable. La responsabilité grande et délicate, celle de présenter des excuses au nom de tous les hommes à toutes les femmes. Assumée.

A l’occasion de votre Journée internationale, Femme je voudrais te faire une confidence :

Au nom de tous les miens

Je te demande pardon

Pour toutes les infidélités

Pour tous les mensonges

Pour toutes les inégalités

Pour tous les abandons

Et tous les manques de tendresse

 

Dès maintenant

Je te promets

Encore plus de loyauté

Encore plus de sincérité

Encore plus d’équité

Encore plus d’affection

Et encore plus d’amour

© Lomeplastic
                                                  © Lomeplastic

 

A.H


«Mon coup de cœur pour la musique» du Sénégal (1/3)

En ce début du mois le plus martial de l’année, une nouvelle série vient s’ajouter à ma planche de billets mondoblogués. Entre canicule et hivernage, la série « Mon coup de cœur pour la musique…» sera un réconfort et porte-bonheur le long de ce mois de mars, palpitant. Point superstitieux, je sens néanmoins par intuition que ledit mois me sera très favorable sur tous les plans. Inch’ Allah !

Musicien moyen, je n’en demeure pas moins un grand mélomane. Mari de toute musique rythmique ou cadencée, pourvu qu’elle soit harmonieuse et fasse bouger. Qu’elle entraîne le mouvement des « devants » ou des « derrières » peu m’importe, la condition c’est que le rythme soit tant soit peu décent.  Mais comment concilier décence et expression de joie ? Manifestation de gaité et retenue ? Un bon thème de réflexion pour psys dont le docteur NathyK qui vit justement dans le pays inaugurant « Mon coup de cœur pour la musique… » : le Sénégal.

Ma première « rencontre » avec la musique sénégalaise s’est faite il y a des décennies à travers le rythme mbalax. Cela avec le Maître Youssou N’Dour, digne représentant de cette musique, tant par sa grandeur que sa renommée à l’extérieur de son pays. Un de ses titres qui m’a marqué est « Dem dem » :

Le mbalax avec ses « ventilateurs » n’est pas le seul rythme du Sénégal, tout comme le ouolof n’est pas la seule langue parlée. Mais pour nous autres non-Sénégalais, ces deux éléments sont tellement liés dans nos têtes que ; lorsqu’on évoque la musique sénégalaise, on n’entrevoit qu’un bon mbalax chanté en ouolof. Mais d’autres registres musicaux sénégalais existent à l’instar du « courant » pulaar avec des tenants comme le Chef Baaba Maal. Je ne peux parler des « grands » du  Sénégal sans évoquer Ismael Lô, dont la musique me fait remonter à la « source » comme celle d’Ali Farka Touré. En tout cas, c’est l’impression que j’ai à chaque fois que je savoure ses morceaux. Incapable de faire un choix parmi ces chefs-d’œuvre, je m’en suis résolu à ne choisir qu’un :« Jammu Africa »  l’hymne du continent africain.

A la prochaine donc pour vous parler des autres représentants et courants de la musique du Sunu Gaal que j’aime. (A suivre)


Quitter ce pays, m’exiler à Internet ou Electric City

Petit pays longiligne, coincé entre la République du Bénin, le Ghana et le Burkina-Faso ; le Togo est le pays que Dieu a choisi (d’ailleurs sans mon avis) pour que j’y vois le jour. Il, Dieu doit avoir ses raisons (objectives !?) dont je ne voudrais pas discuter ici avec Lui. Un plaidoyer en parlera peut-être un jour. De mes pérégrinations et de ma vie, le choix pouvait être de résider ailleurs ou d’acquérir d’autres nationalités. Je ne l’ai pas désiré. Le fait est que je vis au Togo et n’en suis pas moins fier d’y vivre. Mais quand les conditions de travail, de vie ou de « survie » du pays ne suivent pas toujours (mes envies), je pense à envisager de le quitter.

J’aime beaucoup les musiques lusophones surtout cap-verdienne. Mais je ne comprenais pas jusqu’ alors, la mélancolie caractérisant cette musique insulaire notamment la morna. Peu à peu, j’ai commencé à comprendre Césaria Evora¹ et les siens ainsi qu’à découvrir mon empathie capverdienne. Le Togo est une « île » dans l’Afrique occidentale. A cause de ses particularités bonnes ou mauvaises mais toujours extrêmes, qui dénotent dans la sous-région. Rien à avoir avec la morna issue elle, comme on peut l’imaginer, des sentiments mornes et mêmes drôles des habitants de l’archipel aride du Cap-Vert. Ici au Togo, ce qui me plonge parfois dans la tristesse c’est la situation générale de la contrée. Voici un beau petit pays avec de grands potentiels pour réussir, mais qui n’engendre que stress et interrogation pour la majorité des ses habitants. Pays «dirigé » depuis bientôt cinquante ans par une « monarchie républicaine » ou comme une « république monarchique » c’est selon. Situation politique bloquée depuis un quart de siècle. Vie sociale morose avec des « smicards » pointant à 35 000 francs CFA (environ 50 dollars US). Vie économique poussive et ; des situations incompréhensibles comme l’absence récurrente d’Internet et maintenant… de l’électricité. J’aime les conditions meilleures de vie, avec tout le confort qui va avec. Je suis un épicurien qui ne conçois pas qu’au 21e siècle, l’on puisse encore vivre avec des conditions de vie semblables à celles des années 1940 ou 1950. Du temps où les colonisateurs européens finissaient d’explorer l’Afrique et son arrière-pays (tente de toile, poste à galène, lampe à acétylène, gramophone…). Nous sommes en 2015 et pour « vivre » comme tout mondialisé j’ai besoin du minimum : labtop Core Duo, smartphone, tablette, PC tour avec clavier bluetooth, chaînes télé satellitaires, connexion Internet haut-débit (avec Wifi si possible) et le comble… l’électricité.

Lomé, lundi 9 février 2015. Dans la matinée, par plus de deux fois surviennent des arrêts brusques du courant électrique pompeusement appelés délestages. Non content de faire payer l’éclairage public par le consommateur (cela j’espère le comprendre un jour) ; ceux qui ont en charge l’énergie au Togo et particulièrement l’électricité ne lui en assure pas une fourniture continue. Et pourtant la facture, elle arrivera à la fin du mois ou au début du suivant. En ce jour, c’est à peine si je puis travailler. Un de mes « informateurs » m’informe que les employés de la CEET² commencent un mouvement de grève pour « protester contre leurs conditions de vie » jugées en deçà du ratio bénéfices de la société/masse salariale. Décidément c’est tout le monde qui « proteste contre ses conditions de vie.»

Lomé, mardi 10 février 2015, 10h40. Délestage ! De nature apparemment calme, je tourne à ce moment-là, du vinaigre à la soupe au lait. J’exécre tous ceux qui s’occupent de l’électricité dans ce pays, du ministre aux compagnies en passant par les agents qui la coupent (les pauvres). Je tourne en rond et mes pouces avec. J’ai chaud. Je n’aime pas la clim mais un bon air frais de climatiseur me ferait du bien. 14 heures ??, le courant revient enfin. Remise en marche de l’ordinateur, des autres appareils et puis 15h00… patatra ! Le courant électrique est de nouveau « coupé. » Je reste calme cette fois-ci, je n’invective plus personne au risque de faire mon premier AVC³ à seulement la trentaine dépassée. A quoi aurait servi donc tous mes joggings, mes footings, mon abstinence intéressée d’alcool et de bon vin de Gironde? Non, jamais, que le non moins bon Dieu m’en préserve ! Je suis bien droit comme un « i » dans mes baskets, stoïque. Où trouver ce jus appelé électricité? Qu’en sera-t-il des probables dommages subis par mes appareils, sensibles? Tout ceci pour se voir, après plusieurs recours, notifiée dans un courrier par le service des réclamations de la CEET la phrase magique : « Nous déclinons toute responsabilité dans la survenue du préjudice subi par votre matériel… » Il y a de l’électricité dans l’air.

[…]

Je ne compte plus les jours et les heures où le courant est ainsi « délesté.» Après l’Internet qui marche à pas de tortue, voici l’électricité qui a de la peine à être fournie. Et les jours suivants, il en a été ainsi presque quotidiennement dans le mois de février. « C’est le Togo !» comme le disent des compatriotes.

Lomé, mercredi 25 février 2015, 07h08. Délestage…. Je croyais être le seul Africain à souffrir chroniquement de la délestopathie 4. Entre temps, le mondomédecin René Jackson a diagnostiqué les causes des « périodes sombres » que leur fait subir à Douala l’ENEO 5, la sœur jumelle de la CEET.

Post Scriptum. Lomé, samedi 28 février 2015, 13h32. Délestage… Au loin dans le ciel, le bruit pétaradant du générateur électrique d’une grosse huile parvient à mes oreilles acouphènes. A part les dernières obligations personnelles, j’envisage sérieusement de quitter ce mignon petit pays. Adeus ‏6 !

 

 

 

1 Césaria Evora (1941-2011) chanteuse Cap-Verdienne surnommée la «Diva aux pieds nus » qui a fait connaître dans le monde, la morna une musique aux accents nostalgiques.

2 CEET : Compagnie Energie Electrique du Togo, qui fournit l’électricité dans ce pays.

3 AVC : Accident cardio-vasculaire.

4 délestopathie : néologisme personnel désignant la névrose déclenchée à la suite des coupures du courant électrique en Afrique.

5 ENEO: la Société nationale de production et de distribution d’électricité du Cameroun.

6 Adeus : Au revoir en portugais.

 

A.H.